02/01/15
Ah qu'il
est bon de dormir jusqu'à 8h! Les voisins ont été sages et j'ai pu
très correctement récupérer cette nuit, je me sens en pleine
forme!
Après
notre délicieux petit déjeuner habituel, nous nous demandons quoi
faire aujourd'hui... On a beaucoup d'options, il ne reste qu'à
choisir. Vu que le temps a l'air encore dégagé même à cette heure
"tardive", je propose à Flo de tenter d'aller à Tamataka
qui, avec un peu de chance, ne sera pas encore sous les nuages. Par
contre, ça fait encore un peu de route d'ici. Il est d'accord et
nous voici partis avec notre fringante Twingo mouillée en direction
de St Denis, puis vers St Benoit.
La route
qui mène à Tamataka est de toute beauté. Elle monte dans les
collines verdoyantes bordées de petites maisons créoles semblant
être posées là pour le décor. Nous grimpons un peu dans les
nuages, je me demande si nous verrons quelque chose... Eh oui, le
ciel est avec nous et nous dévoile, au bout de la route, un paysage
enchanteur de montagnes luxuriantes parsemées de multiples cascades
qui surgissent de partout. C'est époustouflant! Quel paysage digne
des plus grands films d'aventures dans des contrées sauvages et
inhabitées... Je suis heureuse d'avoir pu admirer ce panorama, il
valait vraiment le coup! Ca aurait été dommage de passer à côté...
Je décide
ensuite d'appeler l'office de tourisme de St André afin de savoir
s'il y a des cérémonies tamoules de marche sur le feu dans le coin.
Nous savons que c'est à cette période mais nous ignorons quand et
où. On nous apprend qu'en effet une cérémonie aura lieu cet
après-midi à Ravine Creuse, on nous conseille d'y aller pour 15h.
Chouette! Moi qui rêvais d'en voir une un jour! Par contre, il faut
s'occuper dans le coin jusqu'à 15h... Nous décidons d'aller faire
un tour à la cascade de la Paix qui se trouve non loin d'ici. Nous y
sommes vite et découvrons deux superbes cascades cachées dans la
forêt qui se jettent dans un beau bassin. Nous sommes surpris du peu
de touristes qui s'y trouvent. On ne peut pas dire qu'on soit
assaillis par les touristes à La Réunion, où sont-ils donc? Même
sur la côte, on voit plus de Réunionnais que de vacanciers. En tout
cas, ça nous va très bien, nous profitons à loisir de ces lieux
paradisiaques, presque en solitaires.
Allez, il
est bientôt midi, il faut penser à nourrir Madame. Nous voulons
retourner à notre restaurant de St André où nous avions très bien
mangé le premier midi de notre arrivée, mais nous trouvons portes
closes. C'est fâcheux! Surtout qu'on avait déjà eu du mal à
trouver quelque chose d'ouvert dans ce coin la dernière fois, c'est
encore pire aujourd'hui! On ne peut même pas compter sur nos
habitudes. Nous cherchons, nous cherchons, et en désespoir de cause,
nous trouvons une gargote ouverte dans le parc de Colosie, à moitié
abandonné. Je me laisse tenter par un kebab-frites... Quelle funeste
erreur, alors qu'il fait 40° à l'ombre! En même temps, le choix
était fort limité... Le plat à peine ingurgité, je commence
vraiment à avoir trop chaud et à ne pas me sentir bien. Mon estomac
n'apprécie pas la plaisanterie, Babynou non plus... Vite, il me faut
du frais! J'encourage Flo à atteindre la cascade Délices qui se
trouve à proximité en plein centre-ville (?). En effet, nous y
sommes vite, et malgré sa localisation surprenante, elle apporte un
bain de fraîcheur avec sa forêt de bambous environnante et sa
rivière formant de petites mares naturelles. J'accède avec peine à
cet écrin de verdure, mais je sais que la solution à mon coup de
chaleur se trouve ici. J'enfile mon maillot et entre très doucement
dans l'eau fraîche. Ah, comme ça fait du bien! J'ai l'impression de
revivre... Elle est tombée à pic cette cascade! Je regarde autour
de moi et me rends compte qu'on n'est plus tout seuls cette fois. Des
Réunionnais s'amusent à plonger du haut de la cascade en poussant
de grands cris de Tarzan! Ils sont drôles... Je reste un bon moment
les fesses dans l'eau, sentant doucement mon corps reprendre une
température normale. Heureusement qu'il y a eu cette pause
rafraîchissante avant les marches sur le feu... Ce n'est pas là-bas
que je me serais sentie mieux! D'ailleurs, il est l'heure avec tout
ça, il faut y aller.
Nous
trouvons le village de Ravine Creuse sans problème, y garons la
voiture et rejoignons le petit temple où un énorme brasier
d'environ deux mètres de haut brûle encore. Heu... Ils vont marcher
là-dessus? Des barrières entourent le temple et le brasier,
derrière lesquels se trouvent déjà une multitude d'escabeaux que
les badauds ont apportés et disposés un peu partout. On ne savait
pas qu'il fallait passer chez Leroy Merlin avant de venir! Un bouc
est attaché à un arbre non loin de là. Quelque chose me dit qu'il
va mal finir lui... Il n'y a pas encore grand-monde, nous nous
installons juste derrière la grille, dans un coin sans escabeau, et
attendons, assis sur l'herbe, que les festivités commencent. Des
hommes s'activent près du brasier en enlevant les grosses bûches
brûlantes mais non calcinées du feu à l'aide d'un grand râteau.
Un autre homme arrose les bûches fumantes avec un tuyau d'arrosage,
tandis que d'autres les prennent avec une serviette humide pour les
déposer dans une brouette. Elles seront ensuite emportées loin du
brasier. Ce processus se poursuit pendant deux heures, tandis que
nous les regardons faire, commençant vraiment à trouver le temps
long. C'est sûr, nous sommes aux premières loges, mais l'attente
est bien plus longue que prévu... A quelle heure va-t-elle
commencer, cette cérémonie?
En tout
cas, le gros tas de brasier est devenu plat, une fois les bûches
enlevées. Il ne reste plus que des cendres brûlantes qui forment un
rectangle parfait et que les hommes continuent d'aplanir avec un
grand bâton. Ils sont en nage les pauvres! Travailler aussi
longtemps près d'un feu de cette ampleur sous cette chaleur... Déjà
d'ici, on a les pommettes qui chauffent! Mais ce n'est pas fini...
Ils entourent ensuite les cendres fumantes de fleurs bleues, puis
jaunes, puis rouges. Le résultat est très esthétique. Mais que
c'est long!
Enfin, à
17h30 (nous sommes là depuis 15h), un cortège arrive à grands
coups de tambours et de trompettes. Les voilà!! Une foule de femmes,
indiennes pour la plupart, entourent le brasier, toutes vêtues en
orange ou rouge, certaines portant un bandeau devant la bouche (Flo
trouve que c'est une très bonne idée au passage... No comment!).
Elles s'assoient dans un coin tandis qu'un prêtre tourne autour du
feu en psalmodiant des mantras et en jetant quelques gouttes d'eau
sacrée sur le brasier à l'aide d'une branche d'arbre. Les cendres
fument aussitôt au contact de la moindre goutte. Autant dire que ça
a l'air encore chaud! Des pétales de fleurs sont également jetés
sur le brasier. la foule qui entoure l'enclos est devenue dense, je
suis contente d'être aux premières loges. Certains sont montés sur
leur escabeau pour mieux voir, d'autres ont grimpé dans les arbres
environnants.
Enfin, un
deuxième cortège arrive, composé uniquement d'hommes, certains
portant d'énormes ornements de fleurs sur leur tête. Ils entrent en
foule compacte dans l'enclos et se mettent juste devant nous! On ne
voit plus rien! On entend des cris de femmes motivant les hommes et
nous comprenons que certains ont déjà marché sur les braises, mais
nous sommes du mauvais côté du brasier et voyons juste la foule
compacte d'hommes qui attendent pour traverser le feu. C'est bien
notre veine! Attendre trois heures pour avoir une bonne place et ne
rien apercevoir de la marche sur le feu en tant que telle! Je suis
furax... Nous arrivons à entr'apercevoir quelques marcheurs de dos,
dans un trou de la foule, mais bon, c'est un peu décevant. Je
comprends mieux l'utilité des escabeaux maintenant! Avant de marcher
sur le feu, les hommes se font verser un seau d'eau sur la tête,
marchent sur les braises incandescentes en psalmodiant des prières,
puis reposent leurs pieds dans un bain d'eau quelques secondes afin
de refaire la queue derrière les autres pour repasser à nouveau. Et
ils en redemandent en plus! Chacun d'entre eux effectue la procession
plusieurs fois avant de repartir aussi vite qu'il est venu. Le tout
ne m'a pas paru durer bien longtemps. Les femmes se lèvent à leur
tour pour bénir le feu et se prosterner devant lui. Ensuite arrive
le moment des offrandes... Des dizaines de poulets sont décapités
devant nous (enfin façon de parler, on ne voit toujours pas
grand-chose...) puis leurs propriétaires font le tour du brasier
avec le corps qui bouge encore afin d'y parsemer le sang. La tête
des poulets est posée devant le brasier. C'est au tour des boucs
d'être offerts en sacrifice... Ils sont plusieurs à tenir l'animal
tandis que le bourreau tranche d'un coup sec le cou de cette
malheureuse bête avec un sabre affuté! Quatre boucs sont sacrifiés
ce soir... Les corps sont eux aussi amenés à faire le tour du
brasier sans leur tête avant d'être sortis de l'enclos. Quel
spectacle! On a du mal à se dire qu'on est en France, j'ai
l'impression de vivre une scène indienne comme j'en ai tant vu
d'étranges...
Bon, il
est 19h30 avec tout ça, il fait nuit et on est à l'autre bout de
l'île par rapport à St Leu. La cérémonie est finie, il est temps
de rentrer chez nous. Cette attente nous aura bien crevés. Nous
mangeons rapidement un plat de pâtes à St Denis, puis rentrons à
la case, lessivés. Grosse journée aujourd'hui! Dire qu'on n'avait
rien de prévu au départ! Nous sommes quand même partis douze
heures d'affilée! Allez, bonne nuit!