Journée difficile dans l’Andingitra



08/09/13
 
  Nous nous réveillons encore une fois dès potron-minet afin de nous préparer pour notre aventure dans le parc national où nous passerons la prochaine nuit. En ouvrant les rideaux, nous avons la magnifique surprise de voir qu’il fait un temps superbe ! Enfin !! Alléluia ! Le petit déjeuner nous est servi à la chambre comme hier et nous nous retrouvons à l’accueil comme hier à attendre notre chauffeur.

  Cette fois, c’est un beau 4x4 qui vient nous chercher avec un chauffeur, notre guide et une jeune stagiaire qui va participer à notre excursion jusqu’au bout comme expérience de stage pour ses études en tant que gérante touristique. Elle habite Majunga et y fait ses études mais son oncle est le propriétaire de l’agence par laquelle on a réservé cette excursion, donc elle en profite et est venue jusqu’ici. Du coup, ça fait du monde dans le 4x4. On n’est pas serré comme dans un taxi-brousse mais pas loin ! De plus, on découvre que les fenêtres arrière sont teintées, ce qui nous brouille un peu la vue sur le paysage. Pas terrible tout ça à première vue. Au moins il fait beau ! D’ailleurs je demande d’entrée une faveur à notre guide : je souhaite visiter la ville haute de Fianar avant de quitter la ville, ce que nous n’avons pas fait faute de temps et de soleil. Il nous l’accorde volontiers et après être passés à l’agence récupérer des pulls que j’avais demandés en sus pour m’équiper un peu mieux que je ne le suis dans cette randonnée de montagne, il nous conduit à la ville haute. Sous un soleil radieux, nous découvrons la partie historique de Fianar, qui est sans équivoque la plus belle de la ville. Je mitraille de photos pour mes parents ces rues pavées et ces petites maisonnettes multicolores. Le nombre d’écoles y est impressionnant également. La vue en haut du mont sur Fianar et ses collines environnantes est superbe. Je reviens enchantée de ce petit tour dans la ville haute, ça aurait été dommage de le rater !

  Nous quittons la ville de Fianarantsoa bel et bien cette fois et filons vers le sud, toujours sur cette même route depuis Tana, la fameuse RN7. Flo et moi alternons la place convoitée près du chauffeur, qui permet de mieux voir le paysage et d’être moins serré qu’à l’arrière. Pour une fois qu’il fait beau, celui qui se trouve à l’arrière ne voit pas grand-chose à cause des vitres teintées… C’est bien notre veine… Malgré tout, nous nous délectons de ce que nous voyons et avons enfin l’impression de profiter vraiment de ce beau pays. Ça fait du bien au moral !

  Nous arrivons à Ambalavao, petite bourgade fort sympathique où nous nous promenons un peu tandis que le guide achète des vivres pour notre excursion autant que pour les porteurs. Il nous conduit ensuite au marché de zébus qui a lieu les mercredis et jeudis seulement, nous tombons à pic ! Nous nous promenons au milieu des zébus, de leurs vendeurs et des potentiels acheteurs avec un plaisir non dissimulé. Le tout dans un décor sublime d’ocre et d’or venant des terres environnantes qui nous enchante. Les acheteurs se promènent avec des bouts de bois cloutés afin de tester les réactions des zébus pour vérifier leur vivacité. Sympa ! Les zébus sont ensuite acheminés dans de grands camions à bestiaux, la queue et les pattes attachées. Pas terrible pour les animaux tout ça, mais fort intéressant pour nous !

  Nous remontons ensuite en voiture et quittons la route principale pour nous enfoncer dans les terres arides sur des chemins de terre défoncés. Le 4x4 prend alors tout son sens ! Nous sommes ballotés durant 2h30 sur ces pistes poussiéreuses mais j’avoue ne pas en souffrir tellement les paysages traversés retiennent toute mon attention ! C’est juste sublime ! Cette terre ocre et jaune qui contraste avec les rizières humides, les palmiers et le ciel bleu parsemé de nuages… J’ai envie de m’arrêter à chaque virage pour immortaliser l’instant !

  A un moment, nous nous arrêtons devant un pont où il manque plusieurs planches pour pouvoir le traverser en 4x4. Une impasse ? Pas pour les Malgaches qui bougent les planches, prennent celles de derrière pour les mettre devant, avancent la voiture et ainsi de suite… Si tu veux traverser une rivière à Madagascar, construis d’abord ton pont ! Nous assistons à la scène, médusés, (hors du 4x4, nous ne leur faisons pas une confiance totale !). 

  Vers 14h, nous arrivons enfin à l’entrée du parc Andringitra, fatigués par la route difficile mais heureux d’avoir vu tant de belles choses. Nous pique-niquons d’un sandwich préparé par notre guide (il était temps, je meurs de faim !) puis on nous présente un deuxième guide qui nous accompagnera avec la jeune stagiaire durant ces deux jours dans le parc. On nous apprend alors qu’il y a 3 à 4h de marche pour arriver au camp où nous dormirons ce soir. 4h ? Mais je suis déjà fatiguée par cette journée qui me semble déjà bien complète. 4h30 de route depuis Fianar dont 2h30 sur des pistes, une visite de la ville, un marché aux zébus… Ils n’arrêtent pas de répéter « mora mora » ici, ce qui veut dire « doucement, doucement » mais ils ne l’appliquent pas aux touristes !

  Bon gré mal gré et n’ayant pas vraiment le choix, j’entreprends cette randonnée en ne le sentant pas très bien d’avance. Je dois avoir un sixième sens… en plus, il fait beaucoup moins beau depuis notre arrivée dans le parc et de gros nuages obscurcissent le haut des montagnes. J’étais prévenue : c’est 2h de montée raide. En effet, c’est raide ! Même si mon genou ne me fait pas trop souffrir en montée en général, je sens qu’il est fatigué de cette journée de ballotage dans le 4x4 et traîne un peu. De plus, les nuages assombrissent la vallée, ne la rendant pas très impressionnante. J’ai donc la sensation de monter pour rien et ça, ça ne me va pas du tout, surtout vu mon état de fatigue. Et comme la randonnée, c’est 80% mental, eh bien ça n’arrange rien à ma grimpette que je trouve sans fin. Flo, voyant que je peine un peu, me propose de passer devant pour me donner le rythme, ce qui en effet m’aide beaucoup. Il a un rythme lent mais très régulier qui permet d’économiser de l’énergie.

  Finalement, nous mettrons 3h pour la montée au lieu des 2h prévues sans avoir pris vraiment de pause. Arrivés en haut, nous sommes dans les nuages et ne voyons strictement rien. Autant dire que mon humeur et ma vitalité ont encore perdu des points… On le voyait d’en bas que cette montagne était sous les nuages, pourquoi nous avoir fait grimper jusque-là ? A part dire : « c’est dommage, on ne voit rien », notre guide, parlant français comme une vache espagnole, ne sait rien ajouter d’autre. En gros, il a suivi le planning prévu sans se demander 2 minutes si c’était judicieux par rapport au temps (aussi bien horaire que météorologique). Il est déjà 17h, le soleil se couche dans une heure et on n’est visiblement pas arrivé au campement. Moi, je lui annonce la couleur d’emblée : je me suis fait opérer du genou il y a peu, il est hors de question que je marche de nuit, ça peut être très dangereux si je glisse et que je tombe sur mon genou blessé.  Il ne répond pas grand-chose, je ne sais même pas s’il a compris. 

  Nous ne pouvons de toute façon pas faire grand-chose d’autre que d’avancer dans ce brouillard. Puis, petit à petit, les nuages se dispersent et nous laissent apercevoir les roches aux alentours. On arrive dans la vallée des extraterrestres, un paysage désertique et lunaire, aux formes rocheuses presque inquiétantes. Enfin, je trouve un intérêt à cette randonnée folle ! Puis tout à coup le soleil sort des nuages pour nous montrer un ardent et flamboyant coucher de soleil dans cette contrée lunaire. Un régal pour les yeux ! Nous restons quelques instants fascinés par tant de beauté avant de reprendre nos esprits rationnels : qui dit coucher de soleil dit nuit noire dans peu de temps. Notre guide nous dit depuis une heure que nous sommes à une heure du camp et la réponse ne varie pas quel que soit le temps de marche effectué depuis. Je ne sais que penser. En gros, il faut éviter de le faire en fait.

  Nous sortons notre lampe frontale et entamons la descente une fois la nuit tombée. Déjà que la descente n’est pas mon fort depuis mon opération du genou, mais de nuit et après une journée déjà épuisante, c’est vraiment n’importe quoi. De plus, je stresse deux fois plus ne voyant rien et dépense deux fois plus d’énergie de cette façon.

  Plus personne ne dit mot, nous avons froid, faim, sommes épuisés, mais nous devons continuer à avancer dans la nuit noire. Soudain, mon pied glisse sur un caillou, je me rattrape de justesse, mais mon genou se tord un peu et m’arrache un cri. Je m’assois les larmes aux yeux, je sens mes forces me lâcher. Flo me soutient, me prend la main et m’aide comme il peut. Il ne peut malheureusement pas marcher à ma place. Le guide ne trouve rien de mieux à dire que « demain la descente du pic de Boby, c’est trois fois plus dur ! » Je l’aurais tué… Je me relève et sans un mot, je suis le cortège, le guide en tête, suivi de Flo, de moi, et de la petite demoiselle stagiaire comme garde du corps (comme elle se surnomme du haut de ses 1m50). J’essaie de puiser des ressources au fond de moi, de ne penser à rien, juste mettre un pied devant l’autre. Mon genou gauche me fait autant mal que le droit à force de compenser le plus faible. 

  Au bout d’une bonne heure, nous apercevons une lumière venant dans notre direction. C’est un autre guide qui vient à notre rencontre parce qu’il s’inquiétait de ne pas nous voir arriver. Nous sommes encore à 30 minutes du camp, nous dit-il. Notre guide me remet tout sur le dos, prétextant qu’on a été long à cause de mon genou, que j’allais vraiment doucement. Oui, je n’allais pas vite, mais commencer cette rando à 14h, ça c’est du n’importe quoi. Nous aurons mis 5h pour la faire au lieu des 3 ou 4h prévus initialement, et on n’a presque pas pris de pause !

  Enfin, nous arrivons au camp où notre tente a déjà été montée. Je m’enfuis dans la tente avec Flo pour déverser enfin mon stress et mon épuisement en gros sanglots dans ses bras. Cette journée était trop difficile pour moi et j’ai vraiment eu peur pour mon genou. L’organisation laisse vraiment à désirer dans cette rando !
  Libérée de mes tensions, je rejoins, avec Flo, les porteurs, guides et autres touristes qui en sont au dessert devant le feu de bois de la tente cuisine. Les porteurs s’amusent en dansant et en chantant un rythme entraînant qui me remet vite du baume au cœur. On nous sert un thé brûlant pour nous réchauffer puis on passe directement du goûter à l’apéritif en se faisant proposer du rhum arrangé que j’accepte avec plaisir. Nous savourons ce breuvage alcoolisé tout en écoutant les chants entraînants des guides et porteurs. Je me laisse envahir par le rythme et même si mes genoux ne me laisseront pas danser ce soir, je bouge le haut du corps au son des notes de musique et des chants betsileo.

  Par contre, le dîner met un temps infini à arriver et mes paupières commencent à se faire vraiment lourdes. Il est 21h30 et nous n’avons pas commencé le repas avec cette journée de fous dans les pattes. Enfin, la soupe arrive, je la mange sans appétit tellement la fatigue est forte. J’irais bien me coucher juste après mais il faut attendre le plat principal. Et ils se donnent tellement de mal à le faire cuire dans des casseroles à même le feu de camp ! Enfin le zébu au riz arrive mais aucune bouchée ne passe. Je veux juste qu’on me laisse dormir. Un musicien joue en plus une mélodie à sa guitare à côté de moi, juste assez douce pour m’endormir. Mais il faut attendre le dessert. Je dis à tout le monde que je vais me coucher mais ils me supplient d’attendre le dessert préparé juste pour nous. Donc, j’attends en m’endormant sur ma pierre froide à côté du feu. Les bananes nappées de chocolat fondu arrivent. Ça a l’air délicieux mais la fatigue m’a totalement coupé l’appétit. Voyant mon embarras, Flo me les mange discrètement et les guides sont contents d’avoir satisfait leurs invités. Ils se sont pliés en quatre pour le repas, surtout dans des conditions aussi précaires. Dommage de ne pas avoir pu en profiter !

  Enfin je peux aller me coucher ! La nuit est magnifiquement étoilée et il devrait faire beau demain. On voit même la voie lactée ! Je saute tout habillée dans mes duvets sous une tonne de couvertures et trouve aussitôt le sommeil sur ce confortable matelas gonflable. Ils sont au top au niveau organisation matérielle mais pas pour le reste… j’entends à peine la pluie tomber sur nos frêles voilages.

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