Le 30 septembre 2009
Finalement, j’ai plutôt bien dormi sur mon banc en plastique. Je me réveille vers 8h en ayant quand même récupéré 6h de sommeil. Grâce à mes bouchons d’oreille, je n’ai rien entendu ce matin, pas même les vendeurs ambulants qui passent dans les allées en criant leurs gourmandises ou leurs boissons chaudes. Et le wagon est plutôt calme, la majeure partie des Indiens dormant encore. Personne n’est venu me déranger, ni ne me regarde comme une bête curieuse, ça fait du bien ! Je me prends un petit chaï et des biscuits en guise de petit déjeuner, tout en admirant le paysage qui défile par la fenêtre du train. C’est plutôt plat par ici, il n’y a pas grand chose à voir. Mais j’éprouve une réelle joie à regarder le soleil briller, tout est beaucoup plus sécurisant en plein jour ! Je me sens plus forte et ragaillardie par rapport à cette nuit.
Le train arrive à Madurai vers 11h. Je descends sur le quai encore un peu indécise sur la façon de m’organiser. Je veux être ce soir au Bodhi Zendo, un centre de méditation zen perdu dans les montagnes mais j’aimerais visiter un peu la ville de Madurai ainsi que son célèbre temple avant. Je laisse donc mon sac à dos à la consigne de la gare puis pars à pied à travers la ville. Je m’arrête dans un petit restaurant pour déguster l’un des meilleurs thalis indiens qu’il m’ait été donné de déguster jusqu’à maintenant, c’est un vrai régal ! On met différentes sauces dans une grande assiette à compartiments puis on trempe les chapatis (sorte de crêpes craquantes) ou son riz dans le compartiment de son choix : légumes marinés épicés ou non, jus de citron, lait de coco…Il y en a pour tous les goûts ! Et le tout se mange avec les doigts de la main droite exclusivement, la main gauche étant considérée comme sale en Inde, étant donné que c’est celle-ci qu’on utilise pour se laver après être allé aux toilettes. Dévorer cette excellente nourriture sans ustensile mais juste avec les doigts ajoute un petit plus qui rend les plats encore meilleurs, je trouve. J’adore ça !
Je pars ensuite, accompagnée d’un rabatteur de marchand de tapis qui me colle aux fesses, visiter le grand temple Sri Meenakshi connu dans toute l’Inde du Sud. Avec bien du mal, je réussis à me débarrasser de mon colleur, puis j’entre dans ce grand temple aux 4 tours richement décorées. Il est en effet très beau par ces fioritures et impressionnant par sa taille. Mais la foule m’oppresse un peu et après en avoir rapidement fait le tour, je sors du temple, décidée à quitter cette ville trop bruyante à mon goût. Madurai est une grosse cité poussiéreuse où la circulation rendrait hystérique le plus calme d’entre nous. C’est sans parler des rabatteurs omniprésents qui sautent sur le premier blanc qui passe. Et comme j’ai l’air d’être la seule touriste des environs… Je m’aperçois de plus que je n’ai pas envie de faire du tourisme, je ne suis pas venue en Inde pour ça au final. J’ai envie d’apprendre sur moi-même dans le but de recherche personnelle. La visite des temples, aussi beaux soient-ils, me laisse plutôt de glace.
Je retourne à la gare dans l’idée de partir immédiatement pour mon centre zen. J’hésite à me taper 6h de bus pour y aller ou bien me payer un taxi et me la jouer princesse pour une fois. Allez, je ne réfléchis pas longtemps et vote pour le taxi ! Le centre est à 3h d’ici et je vais payer une fortune pour l’Inde à m’y faire transporter en taxi mais lorsque je convertis en euros et m’aperçois que ça me revient à environ 30 euros le trajet, je décide que ce n’est pas une trop grosse entorse à mon budget. Je peux bien m’octroyer ce plaisir après la nuit que j’ai passée ! J’essaie alors d’expliquer à un chauffeur de taxi où je souhaite me rendre mais ce n’est pas chose aisée. Dans la culture indienne, il n’est pas bien vu de répondre « je ne sais pas » à une question, ça sous-entend qu’on est inculte. Du coup, la plupart des Indiens répondent « oui », même s’ils n’ont aucune idée de la réponse. Donc, quand je commence à demander s’ils connaissent le Bodhi Zendo center, le chauffeur me répond immédiatement par l’affirmative mais je ne suis pas dupe. J’insiste en lui demandant à combien d’heures ça se trouve, auprès de quelle ville etc… et là, je m’aperçois bien du malaise. Seulement alors, il s’en va trouver ses collègues pour leur demander de l’aide sur la façon d’arriver jusqu’à ma destination. Je prononce Bodhi Zendo à tout le monde mais personne n’a l’air de connaître. Je leur montre un papier que j’avais rapidement imprimé à Montréal, sur lequel est dessiné un petit plan et je vois avec soulagement l’œil de l’un d’entre eux s’allumer. « Bodhi Zendo » s’écrie-t-il, comme si ce n’était pas ce que je me tuais à leur dire depuis une heure. Et là, tout le monde lâche un « Ah oui ! » qui voulait dire « Ben pourquoi tu ne nous l’as pas dit plus tôt… ? ». Là, je baisse les bras, je ne comprends plus rien aux Indiens !
Soulagée d’avoir réussi à faire comprendre à mes acolytes ma destination, je monte dans le taxi, m’abandonnant complètement à la conduite sportive de mon chauffeur, lui octroyant toute ma confiance quant à notre survie sur ces routes indiennes et je m’endors paisiblement sur la banquette arrière. Je suis réveillée par un virage un peu serré et un klaxon tonitruant du camion d’en face qui fait une embardée afin de nous éviter de justesse. Nous avons commencé à grimper dans les montagnes et la prise des virages en épingle à cheveux à l’indienne ferait dresser les poils de n’importe quel Occidental. On n’a aucune visibilité dans le virage, peu importe, c’est le moment de doubler un camion tout en priant qu’aucune voiture n’arrive en face ! Sans parler du ravin de l’autre côté… Bon, je préfère faire l’autruche et je me recouche sur ma banquette, le regard à l’abri d’événements qui me donneraient des sueurs froides.
Trois heures plus tard, nous arrivons en haut d’une montagne, à 1700 mètres d’altitude, au milieu d’une végétation dense et verdoyante, à l’inverse des vallées arides que j’ai aperçues du train. Des montagnes nous encerclent de toutes parts, la température est plus supportable, une douce brise nous rafraîchissant agréablement, de petits singes croisent régulièrement notre route comme pour nous signaler que nous sommes sur leur territoire et, plus que tout, un calme et une quiétude remplissent les lieux pour mon plus grand bonheur. On est loin du brouhaha de Madurai ! Le taxi me dépose dans un complexe perdu au milieu de nulle part, aux allures propres et soignées. Evidemment le chauffeur essaie de me soudoyer plus d’argent que prévu pour la course mais je ne me laisse pas faire cette fois-ci. Ils peuvent vraiment être fatigants à la longue, ces Indiens ! Il faut toujours marchander et se battre avec eux pour ce qui concerne l’argent. Rien n’est simple…
J’entre dans le grand bâtiment où aucun bruit n’est audible, à part le pépiement des oiseaux et le vent dans les arbres. Une femme accourt vers moi en chuchotant, c’est la journée du silence, voilà pourquoi il n’y a aucun bruit dans le centre. Je n’étais attendue que demain mais ils ont tout de même une chambre de libre pour moi ce soir. Tant mieux, je me voyais mal refaire les 3h en sens inverse ce soir ! Surtout que mon taxi est parti et que je me trouve au milieu de nulle part. Je n’avais même pas pensé à l’éventualité qu’ils n’aient pas pu m’héberger ce soir, dis donc ! Comme quoi… Elle me montre ma chambre, une adorable petite pièce propre dans laquelle je serai seule pour la semaine. Cette chambre n’a rien à voir avec celle de l’ashram et j’ai l’impression d’être dans un hôtel 5 étoiles ici en comparaison ! Il y a même de l’eau chaude disponible en dehors de la chambre, avec laquelle je peux remplir mon seau pour me laver dans ma salle de bains privative. Une douce couette moelleuse est déposée sur le lit avec son petit oreiller assorti. Le luxe quoi ! Qu’il est bon d’apprécier ce petit confort après plusieurs jours de dénuement matériel. Ca ne m’a pas manqué à l’ashram mais j’avoue être contente de retrouver ces plaisirs simples. Je les apprécie à leur juste valeur du coup !
Un magnifique jardin s’étend autour du centre avec une incroyable vue sur les montagnes. Un jardin japonais zen y est même entretenu en son milieu. J’ai l’impression d’atterrir au paradis ici. Ca ne ressemble en rien à l’Inde que je connaissais jusque-là. Cet endroit est paisible, zen, deux mots qui contredisent en tout point l’Inde comme je pensais la connaître. Apparemment, il existe des endroits cachés comme celui-ci, surprenant et absolument ravissant. Je sens que je vais bien me plaire ici !
On me laisse m’installer tranquillement, il n’y aura pas de méditation collective pour moi ce soir, les gérants préférant me laisser me reposer après ce long voyage. Je commencerai demain la session avec les autres. Parfait, ça me va très bien. D’autant plus que demain c’est une matinée libre, on peut se lever quand on veut ! Ce ne sera pas comme ça tous les jours, j’ai intérêt à en profiter ! Je comprends maintenant pourquoi Raoul, mon propriétaire et ami de Montréal, me disait que le Bodhi Zendo c’était des vacances après un séjour auprès d’Amma… En effet, ça a l’air beaucoup plus tranquille et calme. Peut-être est-ce que ça fait moins travailler aussi. Comme le dit si bien mon ami Jean-Roch : « Ce n’est pas quand tout est parfait qu’on peut évoluer, les changements en nous s’effectuent lors de confrontations avec l’extérieur… ». C’est vrai mais peut-être sera-t-il plus facile de méditer dans une place comme celle-ci. Je vais bien voir !
Je prends une bonne douche tiède et pars méditer seule dans le jardin avec seul le bruit des grillons comme compagnon. Il commence à faire frisquet lors du coucher de soleil, je rentre mettre un pull (c’est une première en Inde !) et des chaussettes. On voit qu’on est en altitude ! Vers 19h, je suis appelée pour rejoindre les autres convives au souper. Je fais la connaissance d’une Française vivant à Auroville en Inde depuis 17 ans, d’un Israélien et d’une Allemande, tous ont largement dépassé la quarantaine. Il n’y a donc aucun jeune de mon âge à la recherche des mêmes aspirations que moi ? Il y a aussi quelques Indiens mais ils sont peu nombreux. La nourriture est délicieuse et c’est un vrai plaisir de laver son assiette avec du vrai produit à vaisselle qui mousse plutôt que du sable ! Je ne tarde pas à aller me coucher après, je tiens à récupérer mon sommeil perdu. Je m’endors en n’entendant que les bruits nocturnes des petits animaux divers. Un calme absolu règne dans ces lieux, je n’en reviens toujours pas. Bonne nuit paisible !
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Bonnes nuits... je ne sais pas combien dans ce havre de paix.... zennnn ;-) Biz Laurence
RépondreSupprimercoucou Laurence
RépondreSupprimerje suis a 3 jours d arriver au monastere -
je serais heureuse de connaitre la suite de ton recit, si c est possible
Liliane - eve.insol@orange.fr
dimanche 6 decembre 2009